meslectures

          | Théâtre

4 juin 2012 : Roland Dubillard, Les diablogues et autres inventions à deux voix (posté le 04/06/2012 à 16:46)

Situations absurdes : comment savoir si on ne s'est pas trompé en comptant les gouttes d'eau? comment retrouver des ramoneurs perdus dans de fausses cheminées? Que faire quand on est deux à être seuls sur une île déserte? Faut-il dormir sur ou sous le billard? Deux personnages, joliment nommés Un et Deux, se parlent du suicide de Georges, qu'il a loupé, et de la cousine Paulette. Jeux de mots et de situations, absurde léger, ces petites scènes se dégustent comme le "laissez-pisser de mouton" ou "l'escargot venu tout seul sur commande (huit jours d'avance)", sans qu'on en soit rassasié, tant la prise de tête ne se prend pas au dépourvu, tant je retrouve, le petit génie en plus, mes jeux de langage un peu pourris et le plaisir de triturer les expressions toutes faites, de les détricotter, de les savourer à toutes les sauces et de déraisonner à l'envers du mauvais sens, en prenant à la lettre les mots les plus timbrés.

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6 août 2010 : Jean Cocteau, Les mariés de la tour Eiffel (posté le 11/08/2010 à 14:57)

Une autruche entre sur scène parce que c'est un gros oiseau qui est sorti de l'appareil photo. Deux phonos décrivent une noce qui dérape, ou, pour être plus précis, qui déconne. Simple délire? Sans doute oui, et simple délire qui fait du bien, même s'il manque les musiques. Sur la tour Eiffel, l'autre jour, c'était hélas bien plus conventionnel.

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3 août 2010 : Jean Cocteau, Antigone (posté le 11/08/2010 à 14:52)

Aller à l'essentiel, redire juste ce qui compte dans ce mythe mille fois réécrit. Personne n'hésite, tout se fait vite. Antigone n'est pas plus déchirée que Créon. Ils s'affrontent et le tragique déboule comme un torrent. Tout ça va trop vite. On n'a pas le temps de se poser des questions. Juste une piqûre de rappel qui réénonce l'essentiel : il est des lois plus sacrées que les lois de la cité.

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10 juillet 2009 : Jean Giraudoux, La guerre de Troie n'aura pas lieu (posté le 11/07/2009 à 08:13)

Et si elle n'avait pas eu lieu ? Et si Hélène n'avait pas été aussi frivole avec les garçons ? Et si elle n'avait pas été l'instrument du destin ? Giraudoux laisse planer le doute. Et si le tragique était comique ? Et si le comique était tragique ? Les vieillards lubriques de Troie zyeutent la donzelle et c'est leur seul plaisir; Pâris aime se frotter aux jeunes filles; les poètes aimeraient avoir quelque chose à chanter. Conséquence logique ? La guerre. Ceux qui ne la veulent pas (Hector et les femmes) ne peuvent rien contre le destin, cette guerre-Janus, qui se présente tantôt comme le visage envoûtant d'Hélène, tantôt comme le cul d'un singe. Echo contemporain ? 1935, c'est la début de la fin de la der des ders. Hitler s'agite. On se demande s'il n'est pas nécessaire de réveiller la guerre que l'on vient d'endormir. Giraudoux prend-il position ? Sans doute pas. Il rappelle juste qu'on se bat bêtement, qu'il n'y a aucune gloire à zigouiller, mais qu'on se bat quand même, pas avec ses ennemis, mais avec ses adversaires. Hitler pourtant est un ennemi, pas un adversaire et la pièce La Deuxième Guerre mondiale n'aura pas lieu a été une tragédie trop longue qui n'a pas pu éviter l'horreur.

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14 juin 2009: Jean Anouilh, Antigone (posté le 15/06/2009 à 19:06)

Cette Antigone-là, fallait-il qu'elle meurt? Est-ce vraiment sur le plan moral que la question se pose? Qui est Créon? Variation sur l'éternelle tragédie, la pièce repose les questions, à la lumière macabre de 1944: vivre coûte que coûte en faisant mine d'être heureux? mourir quand cela ne sert à rien? Les deux solutions sont mauvaises, la révolte crie dans le désert et le pouvoir se couvre de honte pour survivre. Créon n'a pas le choix, et il l'a. Antigone aussi. La tragédie se situe peut-être dans le fait d'accepter la tragédie, de s'y soumettre, de ne pas briser le cercle, de continuer. A la fin, les gardes jouent aux cartes; ils continuent à refuser de jouer un rôle dans l'histoire. Nous ne sommes ni Antigone, ni Créon, ni Hémon, nous sommes les gardes. Et c'est de notre faute.

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22 mars 2009 : Jean-Paul Sartre, Les mouches (posté le 22/03/2009 à 22:40)

Qu'est-ce qu'un acte libre ? Pour répondre à la question, Sartre reprend la vieille histoire des Atrides. Oreste venge la mort de son père en tuant son assassin, Egisthe et sa complice, Clytemnestre, qui n'est autre que sa propre mère. Ce qui est frappant, dans la version sartrienne du mythe, c'est qu'il ne se situe pas sur le plan moral. Sartre ne pose pas la question : "Est-ce qu'il a bien fait ?". Il montre un homme qui pose librement un acte et qui l'assume. Ce qui différencie Oreste de tous les autres personnages, c'est qu'il n'est pas rongé par les mouches du remords, que son crime lui appartient, qu'il ne le fuit pas, qu'il en assume seul l'entière responsabilité. Peu importe donc si cet acte, en tant que tel, est bon ou non. Il suffit qu'il soit entièrement libre et assumé jusque dans ses pires conséquences pour qu'il soit juste. Il n'empêche qu'arrivé au terme de la lecture, une question se pose : "Est-ce qu'il a bien fait ?".

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15 mars 2009 : Jean-Paul Sartre, Huis clos (posté le 15/03/2009 à 10:47)

"L'enfer, c'est les Autres." Souvent, on ne retient que cette phrase, on l'isole, on dit que c'est de Sartre. Et on passe. Réfléchissons. Que veut dire "l'enfer, c'est les Autres" ? Trois personnes qui ne se connaissent pas, un homme, deux femmes, enfermés ensemble pour l'éternité, le dispositif est simple. Il est infini. Tout est possible, d'autant plus que l'une des femmes aime les femmes, l'autre les hommes. Trio infernal, donc, système de personnages classique au théâtre, réinvinté. Qu'est-ce qui change ? C'est peut-être l'impossibilité de mentir. A soi-même, on peut mentir, à l'autre qui te regarde tout le temps, on ne ment pas, on est "nu comme un vers", on est jugé sans concession, parce que l'on existe que par le jugement de l'autre (il n'y a pas de miroir en enfer, comme il n'y a pas de pal), que dans son regard, seul endroit où l'on peut percevoir son reflet. Garcin n'oubliera jamais sa lâcheté, ne la transformera jamais en héroïsme, parce qu'Inès et Estelle savent, parce qu'elles voient. Huis clos est-elle une allégorie ? un discours sur la vie relle, sur l'existence, si chère à Sartre ? Est-ce que sur terre aussi, l'enfer, c'est les Autres ? Nuançons, l'enfer, c'est la conscience que l'autre a de ma faute qui déteint sur moi. Pour ne pas vivre en enfer, il faudrait donc pousser la responsabilité de chacun de ses actes jusqu'à cette question : "Comment les autres (tous les autres et les autres qui m'entourent) jugeront-ils cette action ?" Le malheur, ce ne serait donc pas la solitude, mais son impossibilité radicale.

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27 février 2009 : Eugène Ionesco, Le Roi se meurt (posté le 27/02/2009 à 15:49)
Pas le même impact qu'à la première lecture. J'avais tremblé, je réfléchis. Je me demande si ce roi qui meurt, ce n'est pas Dieu, si ce texte n'est pas une parabole. La reine s'appelle Marie... La terreur de la mort, juste elle, il y a quelques années, un peu de comique aujourd'hui, dans les répliques du garde, dans la naïveté de Juliette, dans les délires du roi. Marguerite est-elle la mort, la faucheuse, une allégorie ? Sans doute est-ce parce que la mort de Dieu, ou sa vie, son existence, toutes ces questions qui me torturaient, se sont éloignées. Sans doute relirai-je ce livre et retrouverai-je son impact quand je saurai que c'est vraiment la fin.
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26 février 2009 : Eugène Ionesco, La leçon (posté le 27/02/2009 à 15:46)
Quintessence de l'absurde. Un faux cours d'arithmétique, qui nie la soustraction, un cours de linguistique, qui distingue la même langue, un couteau, une élève qui a mal aux dents, une bonne complice, un professeur assassin pour la quarantième fois de la journée, tout ça ne veut rien dire. Vraiment ? A-t-on tué les Juifs pour des raisons qui voulaient dire quelque chose ? Ionesco y fait allusion, fait porter au professeur un brassard avec peut-être la svastika nazie et supprime la réplique lors de la première. Il évite la parabole. Il écrit juste un "drame comique", une mécanique hilarante qui aboutit à l'horreur et recommence à l'identique, comme si de rien n'était. L'éternel retour et l'éternel oubli. Faut-il mettre en abîme ce texte en l'abordant en classe ? Tentation.
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28 décembre 2008 : Molière, Amphitryon (posté le 28/12/2008 à 20:33)
Effet comique du quiproquo. Qui est qui ? Qui est cocu ? Jupiter et Amphitryon, en contrepoint Mercure et Sosie. Des coups de bâtons, de longues tirades, des personnages qui n'y comprennent rien. Une femme abusée qui disparaît à la fin, un mari cocu qui rend l'amant de sa femme jaloux, parce qu'il est dieu des dieux et qu'il est obligé de se faire passer pour homme, comédie galante sous couvert de mythologie. Les dieux sont ridicules, les hommes aussi, on s'en amuse. Si le roi choisit votre femme et vous la pique, c'est un honneur, etc. Je ne pensais pas qu'une pièce de Molière puisse être mauvaise. On est pourtant ici bien loin du génie. C'était tombé dans l'oubli. On ça ressort des vieux tiroirs pour l'enseigner à des collégiens, qui auront de Molière une image bien fade. Etait-ce nécessaire ?
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