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| Philosophie

13 août 2006 : Jean-Paul Sartre, L’existentialisme est un humanisme (posté le 13/12/2008 à 17:05) |
Entrée par la petite porte dans une philosophie qui inverse radicalement la conception du monde classique, celle de Jean-Paul Fragnière au café philo pour qui les valeurs sont préexistantes à l'individu humain qui a pour rôle de les intégrer, de les comprendre, de les faire siennes, et non, comme il me semble que le pense Sartre, mais peut-être vais-je trop loin, de les inventer, de les créer. Résumons rapidement ce que j'ai compris à ce petit bouquin. L'existence précède l'essence, il n'y a pas de nature humaine prédéterminée. Nous n'avons donc pas à rechercher qui nous sommes et quelles sont les valeurs sur lesquels repose le bien de manière générale mais à choisir quel homme nous serons et à créer les valeurs qui fonderont nos actions. Le concept clé est celui de liberté mais il ne signifie pas que tout est permis puisque tout acte que je choisis a une valeur universelle dans la mesure où je considère que ce choix, s'il est responsable, est celui que doit faire n'importe quel homme : "Je construis l'universel en me choisissant". Cette philosophie, résumée sans doute de manière trop schématique par Sartre dans une conférence adressée à un large public et par moi-même qui la découvre, a le mérite de mettre l'homme face à lui-même et uniquement face à lui-même, en refusant de rejeter la responsabilité de ce qu'il est sur Dieu, comme dans la pensée chrétienne, ou sur les causalités historico-économiques des marxistes. Je suis ce que je choisis d'être. Voilà une pensée forte qu'il s'agit de creuser car que choisir d'être ? Cette question, Sartre n'y répond pas, du moins pas dans ce texte, parce qu'il veut que chacun se la pose et y réponde par soi-même, librement, c'est-à-dire en assumant de manière totale la responsabilité de ses actes. Cette liberté responsable est une utopie mais elle est la seule possible si l'on refuse, comme j'en suis devenu forcé, l'existence d'un Dieu doué d'une volonté qui me dépasse et qui détermine donc qui je suis. | |
26 juin 2006 : Michel Foucault, L’archéologie du savoir (posté le 27/11/2008 à 21:32) |
Qu’est-ce qu’un discours ? Plus précisément, qu’est-ce qui le rend possible ? La question posée par Michel Foucault me semble cruciale. Qu’est-ce qui fait qu’à un moment donné on a pu dire ceci ou cela ? Qu’est-ce qui fait qu’un domaine du savoir existe ? Foucault écarte l’hypothèse d’une continuité qui feraient des différents discours une tension vers le discours universel dont ils ne seraient que l’ébauche. Pour lui, un discours existe parce qu’à un moment donné un objet de discours se forme. Cet objet ne préexiste pas au discours. Il en est à la fois le contenu et le point de départ. Et le sujet dans tout ça, l’individu qui tient le discours, quelle est sa part de liberté ? Peut-il créer un discours nouveau ? Pour Foucault, le sujet s’insère toujours dans des structures discursives qui lui échappent, « il est une place déterminée et vide qui peut être effectivement remplie par des individus différents ». En énonçant quel discours que ce soit, je m’insère en tant que sujet dans une structure où ma place est déterminée sans que je puisse modifier cette place. Ce que je peux modifier, c’est le contenu du discours mais pas le discours lui-même. La question qui se pose alors est celle de l’apparition de nouveaux discours. Qu’est-ce qui a fait qu’à un moment donné un nouvel objet de discours est apparu ? Pour Foucault, le discours est toujours dynamique, « le moindre énoncé – le plus discret ou le plus banal – met en œuvre tout le jeu des règles selon lesquelles sont formées son objet, sa modalité, les concepts qu’il utilise et la stratégie dont il fait partie ». Un discours est donc en perpétuelle mutation mais cette mutation est interne. Elle échappe au sujet énonciateur, qui ne peut que prendre position dans un système discursif donné à l’avance. Il faut donc, pour adhérer à la pensée de Foucault, renoncer au rôle de l’homme de génie constituant par son unique réflexion des savoirs nouveaux et à un discours transcendantal que l’homme aurait pour tâche de déchiffrer afin d’atteindre la vérité. C’est extrêmement difficile. | |
17 avril 2006 : Gaston Bachelard, L’intuition de l’instant (posté le 09/11/2008 à 21:57) |
Quelle est l'unité de base du temps ? Question centrale à laquelle répond Gaston Bachelard : l'instant. Seul l'instant existe. Démonstration convaincante contre les partisans de la durée, qui divisent l'unité de base en fragments imaginaires, alors que l'intuition de Bachelard renverse la perspective : seul l'instant est et la durée n'est qu'un produit de l'imagination. Cette conception du temps n'est évidemment pas sans conséquences. Elle fait de la nouveauté et de la transformation une valeur absolue. Tout instant est un et nouveau. Toute répétition est reprise, c'est-à-dire modification insensible et totale. Cette idée du temps, je ne peux que la rapprocher de celle d'Alain Robbe-Grillet, de sa poétique de la reprise et de l'imagination triomphante, toujours prête à tout chambouler, à nier les individus que l'on croyait éternels, les faisant disparaître définitivement avant qu'ils ne réapparaissent tout aussi définitivement parce que l'instant est création d'un monde totalement nouveau à chaque fois. La poétique de Robbe-Grillet n'est cependant pas calquée sur celle de Bachelard, qui croit au progrès par l'habitude, c'est-à-dire par la mise en place de rythmes qui organisent les instants et créent chez les être humains ce qu'il appelle une conscience. Chez Robbe-Grillet, pas d'habitude, pas d'organisation rythmique, pas de progrès (surtout pas), pas de conscience ou du moins pas une seule conscience. Ce qui différencie le penseur et le romancier, c'est sans doute que le premier est optimiste et le second pessimiste. Le temps n'est qu'une succession d'instants toujours nouveaux mais l'illusion de durée que crée l'habitude peut féconder une philosophie, une sagesse créative, une morale, ou peut, si l'on pousse jusqu'au bout l'intuition de l'instant, détruire la possibilité même de toute habitude, de toute conscience, de toute morale et de toute création féconde, l'anarchie devenant totale, tout se détruisant à l'instant même de son apparition. Bachelard parie en faveur de la raison, du progrès et de l'ordre, Robbe-Grillet en faveur de l'imagination débridée, du bordel, de la liberté absolue. La même intuition aboutit à une philosophie et à une poétique contraires. Quelle est la voie de la liberté ? Celle de l'habitude féconde ou celle du renversement constant de toute réalité autre que l'instant ? Faut-il apprendre quelque chose des instants passés pour créer des instants nouveaux meilleurs ou faut-il nier constamment les instants passés pour créer des instants vraiment nouveaux ? Le souvenir est-il un outil nécessaire dans la construction du présent, même s'il n'existe en réalité pas, ou n'est-il lui-même qu'un instant présent qui mime un passé à jamais révolu et sans sens ? La morale et la science sont-elles possibles ? Question clé à laquelle il semble nécessaire de répondre par l'affirmative et de suivre donc Bachelard, même si c'est partiellement au prix de notre liberté. Il est pourtant nécessaire de ne jamais considérer cette réponse comme définitive et, à tout instant, de pouvoir user de notre liberté, qui est par principe illimitée. | |
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